"Tantôt libératrices, tantôt oppressantes, les étreintes sont les messagères de notre affect. On serre pour aimer, on serre pour haïr, pour dominer, se donner, se perdre ou se retrouver. Elles tissent nos liens familiaux, transforment une relation de travail, alimentent une aventure humaine.
Les étreintes parlent quand les mots s’épuisent.
Elles disent : « je te considère », « je suis reconnaissante d’avoir cette amitié », « je me sens bien », « j’ai besoin de toi », « je cherche la sécurité ». Leur intensité est comme le volume d’une voix intérieure.
Quand on est assis sur des bancs universitaires, sur des chaises de bureau, la décence nous en éloigne. J’ai été assise sur ces bancs, sur ces chaises ; puis isolée, en 2020, sur mon canapé. J’ai pensé : « A-t-on tant perdu le fil de nos besoins émotionnels qu’on les exclut de nos études ? Le droit n’est-il pas, à l’origine, entièrement guidé par notre affect ? Quelles sont les règles qui nous séparent de notre besoin d’étreindre ? »

Dans cette exposition, vous trouverez ma dernière série de peintures représentant des étreintes. Elles sont reliées par un bleu de phtalo auquel je reviens sans cesse ; c’est ce qui leur vaut leur appellation commune de « série bleue ». La profondeur marine de ce bleu me fascine : impalpable, immense, elle me semble parfaite pour accompagner l’infinie diversité des rapports humains.
Certaines de ces acryliques représentent des étreintes empruntées à des moments sportifs qui m’ont marquée. Je suis toujours bouleversée par le contraste entre la dureté et l’exigence de certaines disciplines, et la force des étreintes qui marquent leur jeu, leurs victoires. Elles sont l’avènement du rapport au(x) corp(s) dans toute sa splendeur !
J’ai choisi d’accompagner ces peintures de poèmes et textes écrits par divers auteurs, autour de l’étreinte, voire de son absence : la poète et photographe Trinidad Pinazo, le poète Louis Bolot, le poète Norbert Angelopoulos, les rappeurs Sépal, Kivive et Léo Consonni (Lel)… et moi-même.
Vous trouverez également une sélection de mes aquarelles de nus, réalisées en grande partie durant les confinements. Tous les modèles sont des connaissances, des personnes qui s’aiment, se sont aimées, se sont connues. Elles m’ont offert leur confiance et me dévoilant leur corps, parfois pour se réconcilier avec elles-mêmes."

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Julia Even est artiste-peintre. Diplômée de métiers d’arts en Fresques, elle retrouve dans l’étude des œuvres de Michel Ange son intérêt pour le travail des carnations et des figures dansantes.
Autrefois étudiante à la Faculté de Droit de l’université Toulouse Capitole, elle a toujours entremêlé son parcours « de bureau » avec les projets artistiques : illustrations d’ouvrages de droit (Revue Méditerranéenne de Droit Public), d’affiches de colloques (Collectif de l’Unité du Droit), réalisation de bandes dessinées explicatives du droit (Les Arrêts illustrés).
Ses origines méditerranéennes, la danse, l’amour et les amitiés qui l’entourent la guident vers ce qui progressivement devient le fil directeur de son travail de création : la représentation du corps, du rapport à soi et aux autres.
Elle expose régulièrement ses créations, et donne des cours de dessin et de peinture.