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"Basic Instinct", Critique d'Eloïse Pécheur

Crée le 18 mars 2025

Atelier Critique cinéma (initiation) / 1er semestre 2024-2025

« On ne connaît jamais vraiment quelqu’un même quand on pense le connaître intimement ». Dans Basic Instinct, Paul Verhoeven explore les frontières floues entre désir et danger, tissant un thriller érotique qui interroge les notions de confiance et de luxure.

Catherine Tramell, allégorie de la tentation
En Catherine Tramell, Sharon Stone incarne une tentation irrésistible avec face à elle, Nick Curran, interprété par Michael Douglas, un homme fragile, irritable, en quête de contrôle sur ses pulsions. Ancien drogué et alcoolique, il transfère ses anciennes dépendances sur Catherine, qui devient une nouvelle forme de "drogue". Cela illustre l’impossibilité pour Nick de se détacher de ses comportements autodestructeurs et chaque interaction avec Catherine renforce cette obsession. Cette dynamique met en lumière la fragilité psychologique de Nick et l’aura manipulatrice de Catherine, capable de transformer ses failles en instruments de pouvoir.

Un commun besoin intrinsèque de stimulation
Le film joue sur le parallèle entre la scène d’ouverture sanglante et le final ambigu, où le pic à glace devient une signature symbolique. Ces deux moments révèlent la toxicité latente de la relation entre Catherine et Nick, qu’ils cultivent mutuellement. Catherine a un besoin compulsif d’être stimulée par une nouvelle obsession, qu’elle trouve chez Nick, tandis que ce dernier s’enfonce dans une fascination maladive. Ce jeu psychologique, aussi cruel que séduisant, leur convient et les nourrit émotionnellement. Pour Catherine, une nouvelle émotion ( un mélange d’attraction et de peur ) naît, offrant une nuance à son personnage. Cette relation, à la fois stimulante et destructrice, sert de cœur émotionnel au récit.

L’harmonie entre musique et mouvements
La bande-son de Jerry Goldsmith joue un rôle crucial dans le maintien de la tension du film. La musique, omniprésente, épouse l’intensité croissante des scènes, accentuant les moments clés. Lors de la première nuit entre Catherine et Nick, ou encore dans la scène finale, la musique manipule les attentes du spectateur, le poussant à douter de l’issue tout en le tenant en haleine. Ce jeu musical subtil participe à la montée en puissance du suspense, jouant autant avec les personnages qu’avec le spectateur. Le contraste entre ce que la musique suggère et ce que l’on sait du déroulement des événements ajoute une couche supplémentaire d’ambiguïté, rendant le visionnage encore plus captivant.

Reflet satirique sociétal
Basic Instinct est plus qu’un thriller psychologique ; il est aussi une critique sociale. La scène mémorable de l’interrogatoire, où Catherine domine une salle pleine d’hommes ostensiblement « béants » devant sa maîtrise et sa sensualité, dénonce les déséquilibres de pouvoir liés au genre. Verhoeven exagère intentionnellement pour souligner le malaise face à une femme qui renverse les codes traditionnels : elle ne subit pas le regard masculin, elle le dirige et s’en amuse. Cette caricature de la société, où la peur et le désir s’entremêlent, pointe les hypocrisies des rapports sociaux et met en lumière l’intimidation que peut provoquer une femme émancipée et autonome.

Eloise Pécheur