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"Basic Instinct", Critique de Lukas Mara

Crée le 18 mars 2025

Atelier Critique cinéma (initiation) / 1er semestre 2024-2025

Un pic à glace : un symbole de mystère et de vulnérabilité dans Basic Instinct

Avez-vous une idée de ce qu'est un pic à glace ? Un outil courant, pratique, spécialement conçu pour briser la glace. Il n'y a rien de plus banal. Cependant, après Basic Instinct, il prend une toute autre signification : celle de la force sévère du mystère et de la vulnérabilité des apparences. Le film réalisé par Paul Verhoeven ne se contente pas de briser la glace, il remet en question nos certitudes en laissant derrière lui un mélange de fascination et de désarroi.

Dès le début, le ton est donné. Une scène de lit agitée, un rythme musical puissant, de la passion, de l’intensité, de l’amour et du frisson qui se métamorphosent rapidement en horreur. Un pic à glace qui tombe et retombe sans cesse, entraînant la mort, qu'on en soit conscient ou non. Et on s'en doute, le spectateur reste sous le choc.

Paul Verhoeven ne cherche jamais la clémence ; il aime manipuler notre perception, tout comme Catherine manipule tous ceux qui croisent son chemin. Interprétée par Sharon Stone, Catherine est un mystère à part entière. Écrivaine renommée et principale suspecte, elle rédige des romans qui semblent anticiper ses crimes. À la beauté glaciale, à l’intelligence brillante et à la capacité de séduction hypnotique, elle incarne l'expression « se méfier de l’eau qui dort ». Son interrogatoire, devenu culte, démontre toute la puissance de son contrôle. Avec un croisement de jambes inoubliable, elle transforme une salle remplie de policiers expérimentés en pantins captivés. Elle ressemble à une vipère qui captive ses proies avant de les attaquer.

Face à elle, Nick Curran, joué par Michael Douglas, n’est pas l’homme idéal pour affronter une femme comme Catherine. Drogué, alcoolique, marqué par un passé trouble, il est également instable. Comme on dit, « qui se ressemble s'assemble », et leur relation devient rapidement un jeu dangereux où désir et danger se mêlent. Malgré sa formation à repérer les imperfections des autres, Nick se retrouve vulnérable devant Catherine, qui joue avec lui comme un chat avec une souris. Leur relation, marquée par jalousies, trahisons et pulsions incontrôlables, fonctionne comme un miroir déformant où chaque individu dévoile ses faiblesses.

Sur le plan technique, le film est un véritable bijou d'atmosphère. Souvent, la caméra enferme le spectateur dans des espaces restreints, engendrant une tension étouffante. Les interactions entre ombres et lumières, ainsi qu’une bande-son captivante de Jerry Goldsmith, accentuent cette sensation d’isolement psychologique. Les cordes sourdes et les percussions sombres des œuvres orchestrales instaurent une ambiance à la fois éthérée et effrayante. La mise en place judicieuse de silences crée également une atmosphère menaçante, laissant le spectateur dans une attente anxieuse. Dans ce contexte, le son ne joue pas seulement un rôle de complément, mais devient une extension de l’univers psychologique du film, manipulant nos sensations de manière singulière, entre rêve et cauchemar. Parfois, on se sent enfermé dans une cellule mentale.

Lukas Mara